Notre cerveau n’est pas un robot

L’intelligence artificielle (IA) nous inquiète, pourtant nous la côtoyons déjà, et dans de nombreux secteurs d’activité. Dont le secteur médical, par exemple, où c’est le c’est le cas avec Watson, une intelligence artificielle capable d’analyser certains types de cancers, puis de proposer un programme de traitement personnalisé. On nous dit que les robots sont en train de remplacer les hommes. Certaines études universitaires annoncent que la moitié des métiers actuels auraient de grandes chances de disparaitre. Un robot humanoïde (Sophia) est même devenu, pour la première fois, citoyen d’un pays en recevant récemment la nationalité saoudienne…

L’innovation numérique prétend pouvoir tout automatiser. Et pourtant certains chercheurs, parmi nos contemporains, décrivent une réalité bien différente. A travers le monde, en effet, des millions d’hommes effectuent des micro-tâches de travail dont les machines ne peuvent pas s’occuper (tri, évaluation et correction d’informations) et qui servent finalement à permettre à la machine d’apprendre et de mieux fonctionner.

Le travail fait à la main par nos anciens et que l’on pensait voir disparaitre, est largement devenu le travail du doigt. Et l’on nomme ces millions d’hommes et de femmes qui nourrissent les machines les « travailleurs du clic ». Ou encore mieux formulé, « de l’intelligence artificielle largement faite à la main ».  L’externalisation des tâches, dans le monde d’aujourd’hui, comme la précarisation du travail profitent cependant à ce « digital labor », lequel est largement sous-rémunéré. Et le vrai danger, selon certains sociologues, plutôt que le remplacement du travail humain par les robots, est sa sous-rémunération, donc sa déshumanisation, mais c’est là un autre débat.

Avec l’avènement de l’intelligence artificielle et des nouvelles technologies en matière de traduction, les dignes représentants de cette profession se posent eux aussi des questions. On assiste à une transformation évidente du métier, surtout depuis les années 2015 avec l’arrivée des NMT. Les NMT et les formes de traduction automatique basées sur l’intelligence artificielle ont amené une amélioration tellement rapide en quelques années, qu’il est rapidement devenu évident que la donne allait changer. Il ne faut pas oublier, cependant, le battage marketing, qui nous fait croire que les NMT nous sont indispensables.

Comment faut-il réagir ?

Nous devons connaitre les caractéristiques de l’IA et surtout ses faiblesses, pour savoir de quelle manière nous pouvons jouer un rôle actif dans la transformation du monde de la traduction. Un nouveau monde hybride, à la fois traduction par la machine et l’être humain. Il revient en effet aux traducteurs humains d’aujourd’hui, de redéfinir leur valeur dans cette industrie. Car nous vivons dans un monde dans lequel les hommes et les robots devront apprendre à vivre et surtout à survivre ensemble.

Aujourd’hui les écrits à base d’outils reposant sur l’IA excellent en matière de rapidité, d’exactitude et d’efficacité, et sont capables de fournir des résultats corrects, mais ils manquent la plupart du temps de « personnalité ». Ce qui est tout à fait normal, et heureusement pour nous. Les ordinateurs nous aident, certes, à transférer une part du message dans l’autre langue. Un être humain possède, lui, une culture, il ressent des émotions, il a des convictions, et il sait faire preuve d’empathie. Ce côté humain indéfinissable, inquantifiable et à jamais irremplaçable par la machine, car elle ne le comprend pas. Aussi elle n’est pas capable de le reproduire. Et c’est bien là qu’un traducteur en chair et en os fait la différence. Car il fera son travail son travail avec sa propre personnalité (celle du destinataire de l’information aussi bien sur) son propre niveau d’éducation, ses émotions, toute cette partie de nous sans laquelle nous vivrions dans un monde impersonnel et aliénant. Et qui donne surtout au message traduit tellement plus de sens…

D’où l’importance d’avoir une connaissance approfondie de sa propre culture, ainsi que de ses ramifications (ex la culture française en métropole et la culture créole aux Antilles françaises). Les traducteurs doivent agir comme des experts de la culture du marché visé. Ils doivent non seulement s’assurer que le fruit de leur travail est bien compris, qu’il ne heurte aucune sensibilité, et qu’il soit le reflet exact du caractère culturel du document d’origine. A nous de démontrer que nous sommes des spécialistes, non seulement de la culture, mais aussi de la nature humaine. Et de nous assurer tout simplement, que l’âme du contenu d’origine (du document source) est correctement véhiculée. Ce qui serait la moindre des choses pour nous. Et ce qu’un algorithme ne peut en aucun cas transmettre.

Car si l’ordinateur effectue du travail rapide et « de gros », les humains, grâce à leur empreinte unique,sont capables d’obtenir un rendu complet plus important que la somme de ces parties. Et si le client souhaite communiquer efficacement à l’international, avoir une présence internationale, et s’il souhaite utiliser des documents qui reflètent sérieusement sa marque,  il ne peut pas se contenter de traductions automatiques. Il a besoin de services de traduction de la plus grande qualité, tout comme de la valeur nuancée, de la précision et de l’assurance professionnelle qui sont fournies par un traducteur humain.

Il ne faut donc peut-être pas avoir peur des robots, que ce soit dans le domaine de la traduction ou en général, ni même, dans l’absolu, de la façon dont les hommes les conçoivent… Il faut peut-être simplement vivre avec eux, accepter leur aide parfois précieuse, en ne perdant jamais de vue que l’intelligence humaine (la nommera-t’on IH ?) est plus complexe qu’un algorithme.

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